Sciences, médias et politique en temps de crise : des univers à concilier
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Panélistes
Ryoa Chung
Co-directrice du Centre de recherche en éthique qui regroupe des membres de sept universités québécoises, Ryoa Chung est professeure titulaire au Département de philosophie de l’Université de Montréal, chercheuse au Centre d’études et de recherches internationales de l’UdeM (CÉRIUM) et enseigne l’éthique médicale à la Faculté de médecine. Ses champs de recherche portent sur l’éthique des relations internationales, les inégalités de santé, la philosophie politique et les approches féministes. Elle est membre de l’équipe de la Chaire franco québécoise LIBEX sur les enjeux de la liberté d’expression. Elle est lauréate d’un prix de recherche de la Fondation de la Croix Rouge française qui lui sera remis en octobre 2023 à Science Po Paris.
Ses articles (en solo ou avec co-auteurs) ont paru dans des revues telles que Journal of Social Philosophy, Public Health Ethics, Revue internationale de sociologie, Canadian Journal of Philosophy, Journal of Medical Ethics, Journal of Human Rights Practice, The Lancet. Ryoa Chung a co-dirigé l’ouvrage Éthique des relations internationales (Presses universitaires de France, 2013). Elle co-dirige l’ouvrage collectif Forced Migration and Health Justice sous contrat pour Oxford University Press et écrit un livre en français intitulé Philosophie politique et inégalités de santé.
Depuis 2017, Mme Chung collabore régulièrement aux émissions Les Éclaireurs, Plus on est de fous, plus on lit! et Moteur de recherche à Radio-Canada Ici Première et discute de questions philosophiques ou d’enjeux sociaux du point de vue de l’éthique publique.
Caroline Quach-Thanh
La Dre Caroline Quach-Thanh est professeure titulaire aux départements de Microbiologie, infectiologie et immunologie, et de Pédiatrie de l’Université de Montréal. Elle est professeure associée au Département d’Épidémiologie, biostatistiques et santé au travail de l’Université McGill et collaboratrice scientifique à l’École de Santé Publique de l’Université libre de Bruxelles. Elle est l’officier de Prévention et contrôle des infections du CHU Sainte-Justine où elle est également microbiologiste-infectiologue. La Dre Quach est clinicienne-chercheure et titulaire de la Chaire de recherche du Canada, niveau 1, en prévention des infections.
Caroline Quach a été la présidente du Comité consultatif national en immunisation de l’Agence de la santé publique du Canada de 2017 à 2021 et la présidente actuelle du Comité sur l’immunisation du Québec. Elle a présidé l’Association de microbiologie médicale et de maladies infectieuses du Canada de 2014 à 2016. Elle a été reconnue comme fellow de l’Académie canadienne des sciences de la santé et de la Society for Healthcare Epidemiology of America. La Dre Quach a été sélectionnée comme l’une des Femmes les plus influentes du Canada en 2019 dans la catégorie Sciences et technologie (Manulife Science and Technology). Elle a reçu l’Ordre du mérite de l’Université de Montréal en 2021 et a été nommée Officière de l’Ordre national du Québec en 2022. La même année, elle a reçu le prix du Distinguished Scientist Award de la Canadian Society for Clinical Investigation et le prix Femmes de Mérite, catégorie services publics, de la Fondation du Y des femmes.
Elle est la présidente d’honneur du 90e Congrès de l’Acfas, organisé en mai 2023 à l’Université de Montréal, HEC Montréal et Polytechnique Montréal.
Amélie Quesnel-Vallée
Amélie Quesnel-Vallée est titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les politiques et les inégalités de santé à l’Université McGill. Sociologue de formation, elle est professeure dans ce département, ainsi que Directrice inaugurale du Département d’équité, d’éthique et de politiques de l’École de santé des populations et de santé mondiale, Faculté de médecine et des sciences de la santé. Elle a également fondé et dirige CAnD3, un consortium international regroupant 38 organisations universitaires, gouvernementales, privées et à but non lucratif qui offre une formation à l’appui de la prise de décision fondée sur des données probantes.
Les recherches de Mme Quesnel-Vallée portent sur la contribution des politiques aux inégalités sociales en matière de santé au cours de la vie et ont été récompensées par des prix décernés par des associations professionnelles, notamment la Fondation Fulbright, l’American Sociological Association, la Population Association of America et l’American Public Health Association. Elle est présidente de la Canadian Population Society et ancienne présidente du comité de recherche sur la sociologie de la santé de l’Association internationale de sociologie. Elle a démontré son expérience et son leadership en fournissant des conseils stratégiques à plusieurs organisations, notamment les Instituts de recherche en santé du Canada, où elle est présidente du comité permanent sur la science et membre du comité exécutif du conseil d’administration.
Son engagement envers la vulgarisation scientifique amène Mme Quesnel-Vallée à être fréquemment sollicitée par des médias tels que la National Public Radio, le New York Times et Business Week.
Animatrice
Marie-France Bazzo
Marie-France Bazzo est une communicatrice bien connue. À titre d’animatrice, on lui doit, entre autres, le magazine d’intérêt social INDICATIF PRÉSENT à la Première Chaîne de Radio-Canada et BAZZOTV à Télé-Québec. Elle fut la première morning woman à Montréal, à la tête de C’est pas trop tôt. Son travail de productrice de télévision est reconnu et primé. Elle est derrière le succès de Y a du monde à messe à Télé-Québec.
Sociologue de formation, elle jette son regard aigu sur l’actualité et les phénomènes de société tous les mardis dans La Presse+.
Le télescope James-Webb : voir l’Univers différemment
Lancé en décembre dernier, le télescope spatial James-Webb, successeur du célèbre Hubble, a déjà dévoilé d’époustouflantes premières images!
Collaboration internationale entre la NASA, l’Agence spatiale européenne et l’Agence spatiale canadienne, ce télescope infrarouge de 6,5 m est sans aucun doute l’une des machines les plus complexes jamais construites par l’humain et le plus grand télescope jamais envoyé dans le cosmos. Cette résolution et cette sophistication inégalées sont notamment attribuables aux nombreux appareils de pointe qui le composent, dont une caméra de guidage et un instrument scientifique mis au point par des chercheuses et des chercheurs de l’Institut de recherche sur les exoplanètes de l’Université de Montréal, sous la direction de René Doyon, professeur au Département de physique.
Ce nouvel observatoire spatial hors du commun permet de voir plus loin que jamais dans l’Univers, de scruter la poussière cosmique des galaxies et de découvrir et d’étudier de nouveaux mondes extraterrestres.
Quelles sont les attentes des scientifiques à l’égard de ce télescope? Que nous apprendra-t-il à propos des trous noirs? Quelle sera sa plus grande découverte? En quoi est-il un extraordinaire catalyseur de vocations scientifiques?
Ce sont là quelques-unes des questions qui seront abordées à la 8e Conférence de la montagne, qui permettra, l’espace d’un instant, de quitter la Terre et d’aller au-delà de la Voie lactée.
Conférence organisée dans le cadre des Grandes Retrouvailles
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Conférencier d’honneur
René Doyon
Titulaire d’un baccalauréat et d’une maîtrise en physique de l’Université de Montréal, et d’un doctorat en astrophysique obtenu à l’Imperial College of Science, Technology and Medicine à Londres, René Doyon est l’un des experts mondiaux les plus réputés en matière de recherche exoplanétaire et un chef de file de renommée internationale dans le domaine de l’instrumentation astronomique.
Il est actuellement professeur titulaire au Département de physique de l’Université de Montréal et directeur de l’Institut de recherche sur les exoplanètes et de l’Observatoire du Mont-Mégantic. Ses travaux de recherche portent sur la recherche et l’étude d’exoplanètes et sur la mise au point d’instruments astronomiques à la pointe de la technologie et destinés aux observatoires terrestres et dans l’espace. Il est notamment chercheur principal de l’un des quatre instruments à bord du télescope spatial James-Webb et cochercheur de SPIRou et de NIRPS, deux instruments optimisés pour la détection de planètes semblables à la Terre autour d’étoiles de faible masse. Avec ses étudiants et étudiantes, il a dirigé le développement de nouvelles techniques d’observations qui ont permis, en 2008, d’obtenir les premières images d’un système planétaire multiple à l’extérieur du système solaire.
René Doyon a reçu de nombreuses distinctions, dont la bourse de recherche Killam en 2018, le prix Acfas Urgel-Archambault (sciences physiques, mathématiques, informatique et génie) en 2017, la Médaille d’honneur de l’Assemblée nationale du Québec en 2011, ainsi que le prix de l’Association américaine pour l’avancement des sciences et le prix John-C.-Polanyi du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada en 2009.
Panélistes
Julie Hlavacek-Larrondo
Professeure agrégée et membre du Centre de recherche en astrophysique du Québec depuis juin 2014, Julie Hlavacek-Larrondo est une experte de renommée internationale dans l’étude des trous noirs supermassifs, dont elle cherche à déterminer le rôle dans la formation et l’évolution des galaxies.
Dans ses études de doctorat, réalisées à l’Université de Cambridge, elle a notamment étudié les processus de rétroaction provenant des trous noirs les plus massifs de l’Univers, ceux qui ont été surnommés «ultramassifs» selon les résultats de ses propres travaux. Après avoir remporté plusieurs bourses prestigieuses, dont la bourse de recherche postdoctorale Einstein financée par la NASA, elle a poursuivi ses recherches à l’Université Stanford en Californie. C’est en 2013 qu’elle est entrée au Département de physique de l’Université de Montréal. Elle est titulaire, depuis 2014, de la Chaire de recherche du Canada en astrophysique observationnelle des trous noirs.
Elle est également une ardente défenseuse de la diversité et a notamment cofondé le projet Parité sciences.
Julie Hlavacek-Larrondo est membre du Collège des nouveaux chercheurs et créateurs en arts et sciences de la Société royale du Canada, a été finaliste du prestigieux Prix du Québec Relève scientifique 2019, lauréate du prix Mentorat du concours Chapeau, les filles! en 2018 et finaliste du Prix du public du concours La preuve par l’image de l’Association francophone pour le savoir en 2017.
Nathalie Ouellette
Nathalie Ouellette est astrophysicienne et communicatrice scientifique. Elle est titulaire d’un baccalauréat en physique (avec mention honorable) de l’Université McGill (2010). Elle a ensuite obtenu une maîtrise (2012) et un doctorat (2016) en physique et en astronomie à l’Université Queen’s, en Ontario, qui étaient axés sur la formation et l’évolution des galaxies. Nathalie Ouellette est actuellement directrice adjointe de l’Institut de recherche sur les exoplanètes et de l’Observatoire du Mont-Mégantic à l’Université de Montréal. Elle est en outre la scientifique chargée des communications pour le télescope spatial James-Webb au Canada, en collaboration avec l’Agence spatiale canadienne.
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Éric Montpetit
Éric Montpetit est professeur titulaire au Département de science politique et vice-doyen à la recherche, à la découverte et à la création de la Faculté des arts et des sciences.
La quête du bonheur
Qui ne cherche pas son bonheur? Qui ne souhaite pas vivre dans une société heureuse? Et pourtant, il n’est pas évident de savoir ce qui contribue au bonheur. Faut-il privilégier le pur plaisir ou bien aussi se soucier de la santé ou de la connaissance? Les réponses ne sont pas simples à trouver parce que la question de savoir en quoi consiste le bonheur est controversée. La problématique de la quête du bonheur est peut-être aussi ancienne que la philosophie, mais elle bénéficie d’un regain d’intérêt, notamment en psychologie et en économie. Les conférenciers invités contribueront, chacun à leur manière, à clarifier les enjeux de cette réflexion. Pour le bonheur de tous!
Conférence organisée en partenariat avec
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Les conférenciers
Marc Fleurbaey
Biographie
Marc Fleurbaey est économiste, professeur à l’Université de Princeton (Woodrow Wilson School et Centre for Human Values) et ancien membre du Collège d’études mondiales (de la Fondation Maison des sciences de l’homme de Paris). Diplômé de l’École nationale de la statistique et de l’administration économique en 1986, il est titulaire d’un doctorat en économie de l’École des hautes études en sciences sociales (Paris). Il a travaillé à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Paris), à l’Université de Cergy-Pontoise, à l’Université de Pau, au Centre national de la recherche scientifique et à l’Université Paris Descartes. Il a également été professeur invité à l’Université d’Oxford, l’Université catholique de Louvain et la London School of Economics.
Ses recherches ont contribué à la théorie du choix social et de la répartition équitable avec des applications à la politique de la santé, l’éducation, la fiscalité des revenus, la lutte contre les changements climatiques et la construction d’indicateurs de bien-être. Il est coauteur de Beyond GDP (avec Didier Blanchet, Oxford University Press, 2013) et A Theory of Fairness and Social Welfare (avec François Maniquet, Cambridge University Press, 2011) et il a publié Fairness, Responsibility and Welfare (Oxford University Press, 2008). Il est éditeur de la revue Social Choice and Welfare ainsi qu’éditeur associé de Philosophy and Public Affairs et de Politics, Philosophy and Economics.
Marc Fleurbaey a été membre de la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi sur la mesure des performances économiques et du progrès social, membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et l’un des initiateurs du Panel international sur le progrès social (et auteur principal de son rapport, A Manifesto for Social Progress, Cambridge University Press, 2018). Aujourd’hui, il est membre du Comité des politiques de développement des Nations unies.
Résumé de sa conférence
Le bonheur oui, mais pas n’importe comment
L’argent ne fait pas le bonheur, dit-on, et la recherche effrénée de la richesse dans la plupart des économies du monde semble souvent irrationnelle, surtout lorsqu’elle détruit l’environnement dont dépend la survie de notre espèce. Pourtant, il serait dangereux d’adopter une mesure du « bonheur national brut », comme nouvelle boussole, sans précaution. En effet, les mesures du bonheur subjectif ne sont pas des indicateurs fiables du bien-être réel de la population. Elles sont trop stables dans le long terme et décrivent mal les inégalités. Que faire? Il est possible d’estimer les conditions objectives dans lesquelles vivent les gens tout en pondérant les divers aspects de la vie d’une façon qui tienne compte des priorités des individus. De la sorte, on évalue bien les progrès objectifs réalisés sans négliger l’importance des éléments de la qualité de vie qui ne proviennent pas de la production marchande et sont absents du PIB, comme la santé ou l’inclusion sociale.
Dan Haybron
Biographie
Titulaire de la chaire Theodore R. Vitali C.P. de philosophie à l’Université de Saint Louis, au Missouri, Dan Haybron a obtenu son doctorat en philosophie à l’Université Rutgers. Ses recherches portent sur l’éthique et la philosophie de la psychologie, sous l’angle particulier du bien-être, ainsi que sur des thèmes apparentés en philosophie politique et il a publié de nombreux articles sur ces questions. En 2015, la John Templeton Foundation et l’Université de Saint Louis lui ont accordé une subvention de 5,1 millions de dollars pour entreprendre une étude de trois ans relative à l’intégration des recherches sur le bonheur et le bien-être (Happiness and Well-Being: Integrating Research Across the Disciplines). Dan Haybron est l’auteur de The Pursuit of Unhappiness: The Elusive Psychology of Well-Being (Oxford University Press, 2008) et de Happiness: A Very Short Introduction (Oxford University Press, 2013).
Résumé de sa conférence
Les individus peuvent, à titre personnel, faire beaucoup pour devenir plus heureux. Mais peut-être pas autant qu’on a tendance à le croire. Notre environnement est en effet extrêmement important, façonnant notre état d’esprit et nos choix de multiples façons, souvent inconsciemment. Dans une large mesure, la qualité de vie est une chose que nous devons conquérir ensemble, par exemple en construisant une meilleure « infrastructure de style de vie ».
Marie-France Raynault
Biographie
Marie-France Raynault amorce sa carrière de médecin au CLSC du Centre-Sud de Montréal, où elle exerce la médecine familiale parallèlement à une pratique hospitalière. Elle étudie ensuite l’épidémiologie à l’Université McGill, se spécialise en médecine communautaire et se joint à l’équipe du département de médecine préventive de l’Hôpital Saint-Luc, puis de l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive de Lausanne (Suisse).
À son retour, en 1999, elle fonde l’Observatoire montréalais des inégalités sociales et de la santé, un outil d’aide à la décision en matière de politiques et d’interventions publiques pour réduire les inégalités sociales de la santé, à la Direction de santé publique de Montréal. En 2002, elle devient directrice du Département de médecine sociale et préventive de l’Université de Montréal.
Marie-France Raynault est maintenant à la tête du Centre de recherche Léa-Roback sur les inégalités sociales de santé de Montréal. Elle oriente sa pratique de médecin spécialiste sur les interventions de santé publique susceptibles de réduire les inégalités sociales de santé. Ses recherches portent principalement sur les clientèles vulnérables et la pauvreté, les inégalités sociales de santé et les politiques publiques.
Résumé de sa conférence
La santé, le bonheur, l’argent et la politique
Les travaux de recherche sur les liens entre le bonheur (happiness) et la santé sont relativement récents, mais les chercheurs et les intervenants de la santé publique mesurent depuis des décennies la détresse et le bien-être psychologiques dans la population générale. Ces observations montrent des relations étroites entre l’état de santé physique et les indicateurs de « mal-être ». Elles mettent aussi en évidence un gradient social important. Des inégalités sont déjà présentes en bas âge et vont en s’amplifiant tout au long de la vie.
Une courte vidéo présentera les données montréalaises en comparant la situation au premier et au dernier quintile de revenu. Les interventions de santé publique visent à diminuer ces écarts principalement en agissant sur les conditions de vie des personnes. La promotion de meilleures politiques publiques est l’avenue privilégiée. Les assises scientifiques sur lesquelles cette approche repose seront brièvement exposées.
Si la quête du bonheur n’est pas à l’ordre du jour de la santé publique, dont la mission sociale est « de prévenir les maladies, de prolonger la vie et d’améliorer la santé et la vitalité mentale et physique des individus par le moyen d’une action collective concertée »[1], on peut avancer que ses multiples actions visent par contre à minimiser les déterminants sociaux du mal-être dans la population.
[1] Organisation mondiale de la santé, 1952.
Modérateur
Christine Tappolet
Biographie
Christine Tappolet est professeure titulaire au Département de philosophie de l’Université de Montréal, ainsi que directrice du Centre de Recherche en Éthique (CRÉ) et du Groupe de Recherche Internuniversitaire sur la Normatitivé (GRIN). Ses intérêts de recherche concernent l’éthique et, plus particulièrement, la psychologie morale, soit, les questions se situant à l’intersection de l’éthique philosophique et de la psychologie. Elle est reconnue à l’international pour ses travaux en philosophie des émotions. Au cours de sa carrière, elle a fait paraître près d’une centaine d’articles et de chapitres, d’une dizaine d’ouvrages collectifs ainsi que trois livres, Emotions et valeurs (PUF, 2000), Les Concepts de l’éthique : Faut-il être conséquentialiste ?, co-écrit avec Ruwen Ogien (Hermann, 2009) et Emotions, Values, and Agency (OUP, 2018). Un de ses projets de recherche en cours porte sur le rôle des émotions et plus généralement des états affectifs au sein du bonheur.
Le développement durable : une utopie ?
En 1987, l’Organisation des Nations unies tirait le signal d’alarme : l’humanité ne pouvait plus continuer à puiser dans les ressources de la planète sans penser au lendemain. Il fallait le plus rapidement possible adopter une approche de développement durable qui, en cessant d’opposer économie, développement social et protection de l’environnement, introduisait une volonté d’équité intergénérationnelle pour assurer la pérennité des ressources sans empêcher l’amélioration générale de la qualité de vie.
Trente ans plus tard, si la pauvreté mondiale a considérablement reculé, les changements climatiques s’accélèrent, la biodiversité s’étiole, l’ensemble des indicateurs environnementaux sont au rouge. Et l’on ne semble pas avoir appris de la crise financière de 2008. Doit-on en conclure que le concept de développement durable était une utopie ou une façon de cacher notre inaction? Doit-on suivre d’autres voies?
Conférence organisée en partenariat avec
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Les conférenciers
Bernard Chevassus-au-Louis
Biographie
Bernard Chevassus-au-Louis, 69 ans, normalien biologiste, docteur en sciences, préside l’association Humanité et biodiversité. Il a mené sa carrière de chercheur à l’Institut national de la recherche agronomique dans le domaine de l’aquaculture et des milieux aquatiques et a été directeur général de cet organisme.
Il a été président du Muséum national d’histoire naturelle ainsi que du conseil d’administration de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Il a aussi occupé les fonctions de vice-président de la Commission du génie biomoléculaire, de président du conseil scientifique du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement et de président du conseil scientifique de l’Agence de l’eau Seine-Normandie, et il a présidé le groupe de travail du Centre d’analyse stratégique sur la valeur économique de la biodiversité. Il a récemment publié Voir la vie autrement : éloge de la biodiversité aux Éditions de l’Aube.
Résumé de sa conférence
Préambule :
Nous rappellerons tout d’abord que la distinction entre croissance économique et développement, en insistant sur les notions de bien-être et de développement humain.
- Les big data de la biodiversité
Contrairement à une idée souvent avancée, la terre n’est pas un système fermé. Elle reçoit en permanence un flux d’énergie de notre étoile dont une petite partie est captée par la biodiversité depuis 3 milliards d’années.
Ce « réacteur » que constitue la biodiversité transforme cette énergie en matière, en énergie assimilable par les humains et SURTOUT en informations, source d’innovations potentiels.
- Développement moyen et inégalité
On observe aujourd’hui la fin du « mythe » des 30 glorieuses qui reliait croissance des richesses et réduction des inégalités. Il faut donc s’attaquer au problème des inégalités sans rêver d’une poursuite infinie de la croissance économique.
Pour cela, les solutions fondées sur la naturepeuvent être moins inégalitaires et s’appuyer davantage sur les compétences humaines
- Les limites du modèle des trois capitaux
Le « modèle » des trois capitaux (économique, socio-culturel, environnemental) focalise les débats sur la notion de « substituabilité » (forte ou faible), c’est-à-dire que le développement d’un de ces capitaux se fait en « prélevant » dans un autre.
On retrouve à nouveau un modèle sous-jacent de « système fermé », alors que l’on peut avoir avec la biodiversité des stratégies de co-développement (entre capital naturel et capital humain ou capital économique) et nous en donnerons des exemples.
Thomas Mulcair
Biographie
Thomas Mulcair est avocat, professeur à l’Université de Montréal, fellow au Centre d’études et de recherches internationales de l’UdeM et commentateur politique. Élu en tant que député fédéral du Nouveau Parti démocratique (NPD) lors d’une élection partielle en 2007 (Outremont), il est devenu, dès l’année suivante, le premier député néo-démocrate élu au Québec à une élection générale. Nommé lieutenant québécois de son parti, il a été en 2011 l’un des artisans de la « vague orange » qui a permis au NPD de remporter les trois quarts des sièges au Québec et de devenir ainsi, pour la première fois de son histoire, l’opposition officielle à la Chambre des communes. En 2012, il a été élu chef du parti.
Avant de se lancer en politique fédérale, Thomas Mulcair a siégé, de 1994 à 2007, à l’Assemblée nationale du Québec comme député libéral de Chomedey (Laval). De 2003 à 2006, il a été ministre de l’Environnement du Québec au sein du gouvernement libéral de Jean Charest. S’inspirant de l’Europe, il est l’auteur d’une loi sur le développement durable considérée, encore aujourd’hui, comme avant-gardiste en Amérique du Nord.
Thomas Mulcair a orienté toute sa carrière vers le service public. Il a notamment assumé les fonctions de président de l’Office des professions du Québec (1987-1993), instance gouvernementale règlementant les ordres professionnels au Québec, et de membre dirigeant du Conseil supérieur de la langue française. Depuis janvier 2018, M. Mulcair est président du conseil d’administration du Jour de la Terre.
Résumé de sa conférence
Développement durable: une question de justice et de justesse?
Est-ce vraiment utopique de croire que notre génération peut protéger notre milieu de vie, notre niveau de vie et notre qualité de vie sans compromettre les droits des générations futures?
L’obligation de tenir compte des effets environnementaux, économiques et sociaux de chaque décision gouvernementale, commerciale ou personnelle est admise au niveau constitutionnel, législatif et moral.
Et pourtant…malgré les signaux d’alarme depuis le début de l’ère industrielle, nous continuons de porter atteinte autant à notre propre santé qu’à la biodiversité de la planète.
Dans un monde où l’idéal démocratique – le modèle où la population décide – est de plus en plus mis à mal, la question clé devient: qui décide?
De Rachel Carson et son Silent Spring à Rio et Gro Harlem Brundtland en passant par Kyoto et Paris, le public a compris depuis longtemps l’importance d’agir. Tandis que les gouvernements et les entreprises ont compris depuis longtemps l’intérêt de donner l’impression d’agir.
Et pourtant…Le Protocole de Montréal, ce rare exemple d’un traité international en environnement qui a été bien conçu, bien accepté et bien appliqué pour contrer les substances appauvrissant la couche d’ozone, a été bafoué sans vergogne par de nombreuses entreprises en Chine au cours de la dernière année.
Au-delà des théories des uns et les promesses rompues des autres, comment faire en sorte que le développement durable soit plus qu’une feuille de vigne pour cacher l’inaction?
Si les traités internationaux, la législation et les constitutions demeurent les meilleurs espoirs; la question demeure: qui est habilité pour rendre tout ça réel, pour l’appliquer?
En l’absence de la primauté du droit, qui décide?
Il y a un siècle, les inégalités et les injustices envers la classe ouvrière ont mené à des ajustements forcés, voire des bouleversements de l’ordre établi. Sera-t-il possible de résoudre les inégalités criantes entre les générations sans que de tels bouleversements soient à nouveau à l’ordre du jour?
Lucie Sauvé
Biographie
Lucie Sauvé est professeure titulaire au Département de didactique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Elle est également directrice du Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté et membre de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM. Elle dirige la revue internationale Éducation relative à l’environnement : regards, recherches, réflexions et elle siège au comité de programme du Programme court de 2e cycle en éducation relative à l’environnement de l’UQAM.
Depuis 2011, elle coordonne le Collectif scientifique sur la question du gaz de schiste au Québec. Ses principaux domaines de recherche ont trait aux enjeux de la formation des éducateurs et à la participation communautaire en ce qui concerne l’environnement, à l’éducation scientifique et à l’éducation en matière de santé environnementale. Son expérience professionnelle s’appuie aussi sur 20 années de coopération internationale en Amérique latine (prix de l’Association des universités et collèges du Canada et de l’Agence canadienne de développement international).
Lucie Sauvé a remporté le Prix de reconnaissance de l’Association des doyens, doyennes et directeurs, directrices pour l’étude et la recherche en éducation au Québec pour l’excellence de ses contributions en éducation (2009) et le prix Carrière en recherche de la Faculté des sciences de l’éducation de l’UQAM (2016). En 2015, l’Université de Veracruz (Mexique) lui a décerné un doctorat honoris causa pour souligner l’engagement écosocial qui caractérise ses travaux de recherche et son enseignement.
Résumé de sa conférence
Le développement durable : un compromis, une méprise
Promu par les instances internationales à vocation économique, le développement durable s’est déployé comme un phénomène culturel d’une rare ampleur, porté sur la déferlante de la mondialisation dont il est à la fois produit et moteur. Malgré les limites et les dérives qui sont associées à cette habile stratégie de compromis, il a été difficile jusqu’ici de porter un regard critique sur ce credo contemporain sans soulever des inconforts voire des réactions vives au sein des communautés de recherche et de pratique qui y ont trouvé une axiologie, un socle de signification, une légitimité, voire un pilier identitaire pour y arrimer leurs initiatives. En particulier, l’injonction du développement durable dans les milieux d’éducation formelle tente depuis 20 ans d’imposer un certain vocabulaire et de réorienter les intentions pédagogiques. Dans certains contextes, il apparaît désormais délicat de remettre en question les fondements d’une telle imprégnation. Et pourtant, n’importe-t-il pas de stimuler et de nourrir le débat pour garder bien vive notre distance critique à l’égard des choix fondamentaux qui déterminent notre rapport au monde? Évitant de confondre le programme politico-économique du développement durable avec un projet de société, quels autres cadres de référence pourrait-on adopter ou construire pour soutenir l’émergence d’une écosociété? Est-il possible de « faire avec » le développement durable et de « faire ailleurs » à la fois?
Modérateur
Normand Mousseau
Biographie
Normand Mousseau est professeur de physique à l’Université de Montréal et directeur de l’Institut de l’énergie Trottier à Polytechnique Montréal. Chercheur de renommée mondiale, il s’intéresse à l’évolution des matériaux complexes tels que le verre, les alliages métalliques et les protéines. Il suit également de près la question énergétique et des ressources naturelles. Très présent dans les médias, il est l’auteur de plusieurs livres sur le sujet, dont Au bout du pétrole : tout ce que vous devez savoir sur la crise énergétique (2008) et La révolution des gaz de schiste (2010). En 2013, il a coprésidé la Commission sur les enjeux énergétiques du Québec. De 2011 à 2017, il a produit et animé l’émission de vulgarisation scientifique hebdomadaire La grande équation, diffusée sur les ondes de Radio VM ainsi que sur iTunes. Son plus récent ouvrage, Gagner la guerre du climat : douze mythes à déboulonner est sorti en 2017 aux Éditions du Boréal. En 2017-2018, il a piloté l’initiative Le climat, l’État et nous avec une vingtaine d’experts québécois dans le but de proposer une nouvelle gouvernance environnementale pour le Québec.
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La musique, reflet de nos sociétés?
La musique est omniprésente dans nos vies. Elle est universelle et existe depuis des millénaires. Toutefois, sa consommation a bien changé avec le temps. La technologie offre aujourd’hui plusieurs moyens d’écouter de la musique, peu importe l’endroit et le moment, et elle assure sa diffusion sur la planète entière.
Dans notre société moderne, où l’offre est démesurée et où il faut séduire à tout prix, l’art passe souvent au second plan au profit de la productivité. Dans ce contexte, comment les artistes peuvent-ils préserver leur liberté et assurer leur créativité dans une société où il faut sans cesse se vendre? Comment redonner à la musique la place qu’elle mérite
Finalement, que la musique nous dit-elle de nos sociétés?
À l’occasion de la 5e Conférence de la montagne, François Girard, réalisateur et metteur en scène, Georges Leroux, professeur émérite au Département de philosophie de l’UQAM, et Lorraine Vaillancourt, professeure à la Faculté de musique de l’UdeM, ont discuté de la place de la musique dans notre société.
Les débats étaient modérés par Jean-Jacques Nattiez, professeur émérite de l’UdeM.
Conférence organisée en partenariat avec
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Les conférenciers
François Girard
Biographie
François Girard s’est fait connaître à la fois comme cinéaste et comme metteur en scène à l’opéra et au théâtre. En 1993, son long métrage 32 films brefs sur Glenn Gould connaît un succès international retentissant. Cinq ans plus tard, Le violon rouge, récipiendaire d’un Oscar pour la meilleure bande sonore originale, consacre le cinéaste comme une figure d’importance du cinéma international. Ces deux longs métrages lui ont valu 10 prix Génies et 9 prix Jutra. En 2007, il réalise Soie, d’après le roman d’Alessandro Baricco, qui récolte 4 prix Jutra. Et en 2014 il réalise Le virtuose (Boychoir), qui met en vedette Dustin Hoffman. Son tout dernier film, Hochelaga, terre des âmes, a représenté le Canada dans la course pour l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. Parmi ses autres réalisations, soulignons le film de concert Peter Gabriel’s Secret World, lauréat d’un prix Grammy.
En 1997, François Girard fait ses débuts à l’opéra avec la mise en scène d’Œdipus Rex / Symphonie de Psaumes, de Stravinski/Cocteau, et Siegfried, de Wagner, à la Canadian Opera Company. Il a ensuite dirigé Lost Objects, de Lang/Wolfe/Gordon, à la Brooklyn Academy of Music et Le vol de Lindberg / Les sept péchés capitaux, de Weill/Brecht, ainsi qu’Émilie, de Saariaho/Maalouf, à l’Opéra de Lyon. Parsifal, de Richard Wagner, sa plus récente mise en scène au Metropolitan Opera de New York, a remporté un succès critique exceptionnel.
Au théâtre, François Girard a dirigé Novecento, d’Alessandro Baricco, Le procès, de Franz Kafka, et Le fusil de chasse, de Yasushi Inoué. Plus récemment, il a signé En attendant Godot, de Samuel Beckett. Il est en outre triple récipiendaire du Herald Angel Award pour la meilleure production au Festival international d’Édimbourg.
Enfin, il a conçu et mis en scène, pour le Cirque du Soleil, Zed, le premier spectacle permanent à s’établir au Japon, et Zarkana, présenté au Radio City Music Hall de New York et au Kremlin State Palace Theatre de Moscou avant de s’installer à Las Vegas.
Jusqu’à ce jour, les projets de François Girard ont été récompensés par plus d’une centaine de prix internationaux et ont reçu la faveur du public aux quatre coins du monde.
Résumé de sa conférence
Résumé à venir
Georges Leroux
Biographie
Professeur émérite au Département de philosophie de l’Université du Québec à Montréal, où il a enseigné la philosophie grecque de 1969 à 2006, Georges Leroux est d’abord connu comme helléniste (Platon, La République, Paris, Flammarion, 2004). Ses essais sur la musique (Partita pour Glenn Gould, Musique et forme de vie, Presses de l’Université de Montréal, 2007 et Wanderer. Essai sur le Voyage d’hiver de Franz Schubert, Nota Bene, 2011) lui ont valu plusieurs prix, notamment le Grand prix du livre de la Ville de Montréal et le Prix du Gouverneur général dans la catégorie Essais.
Au cours des dernières années, il s’est intéressé à plusieurs grands dossiers de philosophie publique, en particulier dans le domaine de la laïcité et du pluralisme (Différence et liberté. Enjeux actuels de l’éducation au pluralisme, Boréal, 2016). Il a publié récemment un livre d’entretiens avec Christian Nadeau (Entretiens, Boréal, 2017).
Il est membre de l’Académie des lettres du Québec et de la Société royale du Canada.
Résumé de sa conférence
S’il n’existe pas de société sans musique, il n’en existe aucune qui ait connu simultanément autant de musiques différentes que la nôtre. Les sociétés du passé, de la Renaissance à la modernité, ont promu la figure héroïque du musicien dans laquelle elles se reconnaissaient. Posons la question : dans quelle figure notre société veut-elle se reconnaître aujourd’hui ? Quelle musique veut-elle privilégier comme figure héroïque de la culture ? De Verdi et Wagner à Boulez, cette figure est devenue plurielle, elle s’est fragmentée et cette transformation nous laisse inquiets devant le destin de la création, la recherche d’une figure légitime absolue.
Lorraine Vaillancourt
Biographie
Chef d’orchestre et pianiste, Lorraine Vaillancourt est fondatrice et directrice musicale du Nouvel Ensemble moderne, en résidence à la Faculté de musique de l’Université de Montréal depuis 1989. Professeure titulaire à cette même faculté, elle y a dirigé également l’Atelier de musique contemporaine à partir de 1974 et jusqu’à sa retraite de l’enseignement, en 2016. Elle est régulièrement invitée par divers ensembles et orchestres tant au Canada qu’à l’étranger. Lorraine Vaillancourt a cofondé, avec les compositeurs José Evangelista, John Rea et Claude Vivier, la société de concerts montréalaise Les événements du neuf, qui a existé de 1978 à 1989. En 1990, elle a été à l’origine de la création de la revue nord-américaine Circuit, qui se consacre à la musique du 20e siècle. Présidente du Conseil québécois de la musique de 1998 à 2001, elle a ensuite siégé au conseil d’administration du Conseil des arts et des lettres du Québec jusqu’en 2006. Elle est aussi membre de la Société royale du Canada. Lorraine Vaillancourt a reçu un doctorat honoris causa de l’Université Laval en juin 2013 et elle a été désignée, en février 2016, membre de l’Ordre du Canada en reconnaissance de son apport important à la musique contemporaine. Elle a reçu, en novembre 2016, le prestigieux prix Denise-Pelletier, décerné par le gouvernement du Québec, pour son parcours artistique d’exception. En février 2018, le Conseil québécois de la musique lui a remis le prix Hommage des 21es prix Opus, soulignant son statut d’artiste incontournable du milieu de la musique et afin de couronner sa carrière.
Résumé de sa conférence
La création, en musique, comme dans tous les domaines, est une richesse, un lieu de découverte et de réflexion, une formidable invitation au voyage. Pourtant ce milieu de la création est et restera toujours fragile.
Comment préserver l’espace de liberté nécessaire pour que surgissent des œuvres nourries au savoir, inscrites dans la modernité, sans creuser la distance entre l’artiste, le créateur et son public?
Comment échapper à la dictature du divertissement, du consensus, sans grimper dans sa tour d’ivoire?
Modérateur
Jean-Jacques Nattiez
Biographie
Jean-Jacques Nattiez, professeur émérite de l’Université de Montréal, a enseigné la musicologie à sa faculté de musique de 1972 à 2013. Il est titulaire d’un doctorat sur la sémiologie musicale de l’Université de Paris 8 Vincennes–Saint-Denis. Il a été professeur invité à deux reprises au Collège de France et à la Scuola Superiore di Studi Umanistici de Bologne.
Pionnier de la sémiologie musicale, il a appliqué ses concepts sémiologiques à divers sujets : les œuvres de Wagner; la pensée musicale de Pierre Boulez; la musique des Inuits, des Aïnous, des Baganda et des Indiens Nahuas et les relations entre musique, littérature et mythe. Il est également l’auteur d’un roman, Opera, et d’une autobiographie intellectuelle, La musique, la recherche et la vie. Il publiera prochainement un ouvrage sur les problèmes théoriques de la mise en scène lyrique et il termine la rédaction d’un livre de synthèse sur la musique des Inuits et celle d’un Traité de musicologie générale.
Dans le domaine de la musique du 20e siècle, il a publié plusieurs volumes des écrits de Pierre Boulez et il a réalisé une édition critique de sa correspondance avec John Cage. Il a été le rédacteur en chef de la revue Circuit de 1990 à 1998. Il a été le directeur général d’une encyclopédie de la musique en cinq volumes publiée entre 2001 et 2005 en italien (Enciclopedia della musica) et de 2003 à 2007 sous le titre général Musiques : une encyclopédie pour le XXIe siècle.
Jean-Jacques Nattiez a reçu en 2009 la Médaille d’or du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada pour l’ensemble de ses réalisations en recherche. Il est chevalier de l’Ordre national du Québec, officier de l’Ordre du Canada et chevalier de l’Ordre des arts et des lettres de la République française.
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Le stress: notre meilleur ennemi?
Concept défini à l’Université de Montréal par Hans Selye, le stress toucherait quotidiennement 26 % des Québécois*, soit le plus haut taux du Canada.
Au travail, dans la vie intime et même dans les médias sociaux, le stress peut prendre différentes formes. Souvent présenté de manière négative, comme une maladie ou un syndrome, il se révèle toutefois complexe et sa signification sociale et culturelle est multiple.
Ignorant les frontières entre les sciences, le concept de stress a permis de relier des évènements qui appartenaient auparavant à des univers théoriques distincts et a conduit à un dialogue nécessaire entre les divers champs disciplinaires.
À l’occasion de cette 4e Conférence de la montagne, trois professeurs de l’Université de Montréal aux thématiques de recherche complémentaires, Thierry Bardini, Sonia Lupien et Lourdes Rodriguez del Barrio, ont mis en lumière les causes et les effets du stress dans nos vies.
Les débats étaient modérés par Yanick Villedieu, journaliste scientifique et animateur de l’émission Les années lumière sur les ondes d’ICI Radio-Canada Première pendant 35 ans.
* Statistique Canada.
Conférence organisée en partenariat avec
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Les conférenciers
Thierry Bardini
Biographie
Thierry Bardini est professeur et directeur du Département de communication de l’Université de Montréal. Ingénieur agronome et docteur en sociologie, il se concentre, dès 1990, sur l’histoire et la sociologie de la cyberculture. Il effectue d’abord un travail de fond sur les origines de l’informatique personnelle en décrivant le devenir du laboratoire de Douglas Engelbart au Stanford Research Institute et la migration de ses idées et artéfacts (la souris, la proto-interface graphique, l’hypertexte) à Xerox PARC et Apple. Ce travail a donné la matière de son premier livre, Bootstrapping: Douglas Engelbart, Coevolution and the Origins of Personal Computing, paru en 2000 aux Presses de l’Université Stanford. À partir de 2001, il a prolongé cette analyse par une recherche sur la biologie moléculaire, en reconstruisant son histoire récente depuis son côté obscur, la partie «non codante» de l’ADN. Cette recherche est parue en 2011 aux Presses de l’Université du Minnesota sous le titre Junkware. Il conduit actuellement un programme de recherche financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada intitulé Les bricolages biologiques et les tensions du libéralisme. Dans ses travaux sur le terrain – comme dans ceux des étudiants qu’il dirige aux cycles supérieurs –, il s’intéresse aux manipulations du vivant qui se déploie autant dans les sites de la science citoyenne que dans le cadre de pratiques artistiques (bioarts).
Résumé de sa conférence
«Stress et Internet: un phénomène équivoque»
Thierry Bardini décrira un ensemble de manifestations du stress associées aux usages d’Internet. Par-delà une pensée simpliste qui définit le stress de façon essentiellement négative, comme s’il s’agissait d’une maladie ou d’un syndrome, il montrera à l’aide d’une série d’illustrations tirées de la littérature scientifique (compulsion numérique, coût de la compassion, peur de rater le coche, ignorance des algorithmes et cyberchondrie) que nous avons en fait affaire à un phénomène complexe dont la signification sociale et culturelle ne peut se réduire à une caractérisation univoque.
Sonia Lupien
Biographie
Sonia Lupien est fondatrice et directrice du Centre d’études sur le stress humain, qui a pour mission d’éduquer le public quant aux effets du stress sur le cerveau et le corps en utilisant des données validées scientifiquement.
Professeure au Département de psychiatrie de l’UdeM, elle s’intéresse aux répercussions du stress au cours d’une vie et a mené des études chez les enfants, les jeunes adultes et les personnes âgées. Ses travaux ont démontré que les enfants sont vulnérables au stress et que certains sécrètent même des taux élevés d’hormones de stress dès l’âge de six ans. Les recherches qu’elle a réalisées auprès des jeunes adultes ont mis au jour les effets aigus et chroniques des hormones de stress sur la mémoire et la régulation des émotions. Enfin, son travail sur les populations âgées a permis de souligner l’influence du stress chronique sur le volume de l’hippocampe, une région active dans l’apprentissage et la mémoire.
Elle est l’auteure du livre Par amour du stress, ouvrage de vulgarisation scientifique destiné à faire connaître les résultats des études scientifiques sur le stress humain au grand public.
Résumé de sa conférence
«Sommes-nous de bons juges de notre stress?»
Vingt-six pour cent des Québécois disent vivre au quotidien «assez» ou «extrêmement» de stress. Sachant que les maladies associées au stress coûtent jusqu’à 14 milliards de dollars par année, il y a de quoi s’alarmer. Toutefois, la recherche scientifique montre qu’il existe de grandes différences entre le stress subjectif (celui qui est ressenti et rapporté par les gens) et le stress physiologique, déterminé par la production d’hormones de stress. Dans cette conférence, Sonia Lupien distinguera ces deux types de stress et illustrera comment nos propres préconceptions du stress peuvent augmenter ou diminuer notre réponse physiologique au stress.
Lourdes Rodriguez del Barrio
Biographie
Lourdes Rodriguez del Barrio est professeure à l’École de travail social de l’Université de Montréal et enseigne l’épistémologie des sciences humaines appliquées. Elle est directrice scientifique de la recherche sociale au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Nord-de-l’Île-de-Montréal, elle est à la tête de l’Équipe de recherche et d’action en santé mentale et culture et elle a fondé et dirigé l’Alliance internationale de recherche universités-communautés Santé mentale et citoyenneté.
Depuis une vingtaine d’années, ses recherches portent sur les effets des différentes formes de traitement et des conceptions en matière de santé mentale sur les trajectoires de vie des personnes, leurs récits et leurs manières d’être. Ses méthodes de recherche font une place centrale au partage des savoirs pluriels. Cette approche permet de dépasser la dichotomie entre les dimensions individuelles et les dimensions collectives des problèmes et des solutions possibles. Ses travaux posent aussi la question de l’accès à la protection et à l’exercice des droits, et celle de la citoyenneté des personnes marginalisées. Ces préoccupations se reflètent dans les programmes de recherche et d’innovation des pratiques qu’elle dirige. Elle a ainsi participé à l’élaboration et à l’évaluation d’une démarche novatrice dans les soins apportés aux patients atteints d’une maladie mentale, la Gestion autonome de la médication en santé mentale, reconnue par le gouvernement du Québec et par d’autres pays qui l’ont implantée dans leurs réseaux publics et communautaires en santé mentale.
Résumé de sa conférence
«Le stress: le dialogue entre les sciences pour penser les défis, dérives et limites dans les sociétés contemporaines»
Les mots portent une représentation du monde, ouvrent ou ferment les horizons des possibles. Le concept de stress a traversé les frontières entre les sciences et a permis de relier des phénomènes qui relevaient jusqu’alors d’univers disciplinaires et théoriques distincts. Il a établi un dialogue nécessaire. Plus largement, le mot stress circule à travers le langage courant dans la culture contemporaine. Il est un véritable «passeur» de sens. Dans des sociétés où l’impératif et l’accélération des transformations sont la norme, le concept de stress invite à poser la question des limites.
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Migrations et personnes réfugiées : quels défis, quels enjeux?
Dans son rapport annuel publié en juin 2016, le Haut-Commissariat aux réfugiés annonçait que le nombre de déplacés et réfugiés ayant fui conflits et persécutions dans le monde avait atteint, en 2015, le niveau record de 65,3 millions de personnes.
Qui sont ces personnes déplacées? Pourquoi émigrent-elles? Comment faire face aux crises humanitaires successives qui secouent le monde depuis des dizaines d’années? Quels sont les défis et les enjeux des populations déplacées? Et ceux des pays d’accueil et des organisations non gouvernementales telles que Médecins sans frontières?
Joanne Liu, présidente internationale de Médecins sans frontières, et Saskia Sassen, professeure Robert S. Lynd de sociologie à l’Université Columbia, seront les invitées de la 3e Conférence de la montagne. Afin de mieux comprendre ce sujet fortement ancré dans l’actualité, elles feront part de leurs analyses et dialogueront avec le public.
Les débats seront modérés par Christian Nadeau, professeur au Département de philosophie de l’Université de Montréal.
L’ensemble de la conférence sera prononcé en français à l’exception de l’allocution de Mme Sassen qui sera faite en anglais.
Conférence organisée en partenariat avec le CERIUM et le canal SAVOIR.
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Les conférencières
Joanne Liu
Biographie
Professeure au Département de pédiatrie de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal, son alma mater, Joanne Liu est également diplômée de la Faculté de médecine de l’Université McGill. Titulaire d’une maîtrise internationale en leadership en santé, elle travaille pour Médecins sans frontières (MSF) depuis plus de 20 ans et a été élue présidente internationale de l’organisme en 2013. Spécialisée en médecine pédiatrique au CHU Sainte-Justine, la Dre Liu est intervenue pour MSF auprès des réfugiés maliens en Mauritanie et des victimes de la guerre en Syrie.
En 2014, elle a dirigé une campagne sollicitant l’aide de la communauté internationale lors de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest. Elle a en outre contribué à la création d’un programme de soins médicaux destinés aux survivants de violences sexuelles en République démocratique du Congo. En 2015, le Time l’a nommée parmi les 100 personnes les plus influentes du monde.
Ardente défenseuse du travail de terrain accompli par MSF, la Dre Liu œuvre pour la promotion de soins de qualité orientés vers les patients et cherche à attirer l’attention à ce sujet sur la scène de la santé mondiale. Elle a reçu de nombreuses distinctions, dont le prix Teasdale-Corti d’action humanitaire, du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada, en 2013 ainsi que le titre d’officière de l’Ordre national du Québec.
Saskia Sassen
Biographie
Saskia Sassen est professeure Robert S. Lynd de sociologie à l’Université Columbia et membre de son comité sur la pensée globale, dont elle a assumé la présidence jusqu’en 2015. Tout au long de ses 30 années de recherche, elle a entrepris chacune de ses études avec un postulat de départ inattendu et contre-intuitif dans le but de remettre en cause la vérité établie. Ses travaux se concentrent entre autres sur l’immigration, la mondialisation, les inégalités et les genres.
Elle est l’auteure de 8 livres, traduits en 20 langues, et de plus de 100 articles universitaires publiés dans des revues spécialisées. On trouve également ses écrits dans de nombreuses publications grand public, telles que The Guardian, Le Monde, The New York Times, Die Zeit, La Vanguardia ainsi que sur opendemocracy.net et le Huffington Post. Son dernier livre, Expulsion: brutalité et complexité dans l’économie globale, paru en 2014, traite des expulsions subies dans le contexte de crises financières ou encore de rachats de terres agricoles par les États.
Mme Sassen est née aux Pays-Bas, a grandi en Argentine et en Italie, et a étudié en France. Elle a amorcé sa vie professionnelle aux États-Unis. Polyglotte accomplie, elle maîtrise parfaitement le français, l’anglais, l’espagnol, l’italien et parle également le néerlandais et l’allemand en plus d’avoir étudié le russe et le japonais. Elle a été faite chevalière de l’Ordre des arts et des lettres par le gouvernement français et fait partie de la Royal Netherlands Academy of Arts and Sciences.
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La révolution de l’intelligence artificielle
Une révolution est en cours.
Grâce notamment au deep learning, ou apprentissage profond, et à l’émergence du big data, les avancées dans le domaine de l’intelligence artificielle connaissent un grand bond. Les progrès réalisés sont tels que certains n’hésitent pas à parler de l’avènement prochain d’une quatrième révolution industrielle, faîte d’intelligence artificielle, de robotique et de nanotechnologies. De la santé aux transports en passant par la bio-informatique, la banque ou l’assurance, de nombreux secteurs sont touchés.
Mais où en sommes-nous réellement dans le développement de l’intelligence artificielle? Comment le deep learning la révolutionne-t-il? Quel rôle Montréal et ses universités peuvent-elles jouer pour accélérer le développement des recherches dans ce domaine? Dans quelle mesure l’intelligence artificielle peut-elle changer nos vies?
Lors de cette seconde Conférence de la montagne, Yoshua Bengio, Yann LeCun et Joëlle Pineau, trois sommités internationales de la recherche en intelligence artificielle, nous aideront à mieux comprendre les avancées et les différentes facettes de cette technologie fascinante.
Cette soirée était animée par Vincent Gautrais, professeur à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, titulaire de la Chaire L.R. Wilson sur le droit des technologies de l’information et du commerce électronique.
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Les conférenciers
Yoshua Bengio
Biographie
Yoshua Bengio est professeur titulaire au Département d’informatique et recherche opérationnelle de l’Université de Montréal, directeur de l’institut de Montréal des algorithmes d’apprentissage (MILA) et titulaire de la chaire de recherche du Canada en algorithmes d’apprentissage statistique.
Son ambition est de comprendre les mécanismes mathématiques et computationnels qui permettent à l’intelligence d’éclore. À travers ses travaux de recherche sur les algorithmes d’apprentissage, Yoshua Bengio et son équipe tentent d’offrir aux ordinateurs la capacité de capter des connaissances opérationnelles à partir d’exemples. Une machine qui aurait appris de telles connaissances pourrait ainsi faire des prédictions ou des classifications correctes sur de nouveaux cas et généraliser à de nouvelles situations.
M. Bengio ambitionne ainsi de rendre possible la construction de machines plus intelligentes, capables de comprendre le monde qui nous entoure, de prendre des décisions en conséquence et de rendre ainsi service à la société.
Titulaire d’un doctorat en informatique de l’Université McGill, Yoshua Bengio est également codirecteur du programme Apprentissage automatique, apprentissage biologique de l’Institut canadien de recherches avancées. Il est également éditeur pour le Journal of Machine Learning Research et éditeur associé pour les revues Neural Computation et Foundations and Trends in Machine Learning.
Yann LeCun
Biographie
Professeur à l’Université de New York, où il est affilié au Courant Institute of Mathematical Sciences, de même qu’au Center for Data Science, Yann Le Cun est diplômé de l’ESIEE Paris, école supérieure d’ingénieurs, en électronique et électrotechnique, et de l’Université Pierre et Marie Curie. En 1987, il rejoint l’Université de Toronto et, l’année suivante, les laboratoires AT & T, pour lesquels il développe des méthodes d’apprentissage supervisé.
En 2013, il est recruté par le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, afin de créer et diriger FAIR, Facebook Artificial Intelligence Research, le centre de recherche en intelligence artificielle du géant du Web. Il dirige ainsi une cinquantaine de personnes réparties entre New York, Menlo Park en Californie et Paris.
Les recherches de Yann LeCun portent principalement sur l’intelligence artificielle, l’apprentissage machine, la vision artificielle et la robotique. Il est l’un des chefs de file de l’apprentissage profond (deep learning).
L’une des techniques développées par M. LeCun, le réseau de neurones convolutifs, est utilisée par toutes les grandes sociétés pour la reconnaissance d’images et de la parole et pour l’assistance à la conduite des voitures.
Yann LeCun a publié près de 200 articles et a reçu le Neural Network Pioneer Award ainsi que le PAMI Distinguished Researcher Award de l’Institute of Electrical and Electronics Engineers. Pour l’année 2015-2016, il a été nommé titulaire de la chaire annuelle « Informatique et sciences numériques » au Collège de France.
Joëlle Pineau
Biographie
Joëlle Pineau est professeure agrégée et boursière William Dawson à l’École d’informatique de l’Université McGill, où elle codirige le Reasoning and Learning Lab, et est membre du Centre for Intelligent Machines. Elle est titulaire d’un baccalauréat en ingénierie de l’Université de Waterloo, ainsi que d’une maîtrise et d’un doctorat en robotique de l’Université Carnegie Mellon.
Ses recherches portent principalement sur le développement et l’analyse d’algorithmes d’apprentissage automatique et de prise de décision, avec application de ces techniques en robotique mobile et dans les systèmes médicaux intelligents. Elle a notamment travaillé à la conception d’un fauteuil roulant intelligent, détectant les obstacles et pouvant naviguer de manière autonome sur certains terrains, destiné aux personnes qui, en raison de leur dextérité restreinte ou de leur vision limitée, ne peuvent utiliser les commandes habituelles.
Joëlle Pineau a également développé une expertise inégalée en matière d’application de techniques d’apprentissage par renforcement pour l’optimisation du traitement de maladies chroniques.
Mme Pineau a siégé au comité de programme de nombreuses conférences internationales de premier plan en robotique et en machine learning. Boursière principale du programme « Apprentissage automatique, apprentissage biologique » de l’Institut canadien de recherches avancées, elle a été récemment élue présidente de la International Machine Learning Society.
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Les défis de la démocratie
Si la démocratie est une forme de gouvernement déjà ancienne, c’est encore un jeune régime. La démocratie évoque parfois l’image antique d’Athènes où le peuple se gouverne lui-même, mais c’est à un tout autre régime que l’on pense aujourd’hui : un régime de représentation parlementaire avec des moments de sacralité – les élections – et des chefs qui gouvernent et concentrent un pouvoir de décision et d’action plus étendu que jamais. La vie démocratique réduirait-elle alors à mettre un bulletin de vote dans l’urne une fois tous les deux, quatre ou cinq ans ? Et la démocratie ne serait-elle que le gouvernement d’un seul légitimé par le vote d’une majorité ?
Ancienne et moderne, la démocratie gagne les esprits sur de nouveaux territoires, mais bien qu’elle soit encore en expansion et inspire des mouvements d’émancipation politique, elle fait l’objet de vives contestations à l’intérieur des sociétés où elle est établie depuis plus longtemps. C’est la question de l’égalité et de la justice sociale qui anime la démocratie contre elle-même ; c’est la question du marché et du financement public qui la fait trembler. Comment réguler des formes d’échanges économiques qui paraissent corrompre les institutions et les mœurs démocratiques ?
La démocratie est une évidence pour ceux qui défendent la liberté de conscience et la tolérance mais elle suscite toujours d’incessants débats quant aux projets de vie que les citoyens peuvent poursuivre en commun. Ce sont même les aspirations morales collectives qui semblent cesser d’y être possibles, que l’on pense aux grands projets de société ou aux formes de vie qui reposent sur une spiritualité partagée. Faut-il alors se résoudre à voir les sociétés démocratiques sécularisées se vider de leur substance morale ?
Comment affronter et relever ces défis de la démocratie contemporaine ? Deux éminents théoriciens politiques, deux penseurs pénétrants de notre temps, Michael Sandel et Charles Taylor ont repris, à ses racines historiques, la réflexion sur la démocratie comme manière de gouverner, comme organisation sociale et économique et comme projet de société.
Cette conférence était animée par Daniel Weinstock, professeur à l’Université McGill.
Cette rencontre était organisée avec le soutien de la Chaire de recherche du Canada en éthique publique et théorie politique, détenue par Marc-Antoine Dilhac, professeur au Département de philosophie de l’Université de Montréal.
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Les conférenciers
Michael J. Sandel
Biographie
Michael Sandel est professeur en science politique à Harvard où il enseigne la philosophie politique depuis 1980. Dès 1982, il se fait connaître à l’échelle internationale en faisant paraître l’un des ouvrages critiques de la pensée libérale les plus importants : Liberalism and the Limits of Justice. Avec ce livre, il pose l’un des piliers de ce qu’on appellera par commodité la conception communautarienne, à laquelle on associe aussi Charles Taylor. Il poursuit ce projet avec Democracy’s Discontent (1996) et propose une lecture de l’histoire constitutionnelle américaine qui offre une alternative à la vision procédurale et libérale de la vie politique américaine.
À partir de 2004, Michael Sandel s’intéresse à des questions de société comme celle de l’amélioration humaine avec les problèmes de l’ingénierie génétique et du dopage sportif. Il publie ainsi en 2007, The Case against Perfection. Loin de changer d’objet de recherche, avec ce livre, il approfondit au contraire sa critique d’une conception libérale qui menace paradoxalement le contrôle des individus sur leur vie en leur donnant le pouvoir de se débarrasser de ce qui fait pourtant le sens des réalisations humaines : l’effort. Mais au-delà de l’effort, ce sont les formes de solidarité sociale que l’amélioration humaine corrompt. Ce thème qui était déjà présent dans ces premiers textes se trouve au cœur de son dernier livre : What Money Can’t Buy: The Moral Limits of Markets (2012), qui fait suite au Tanner Lectures on Human Values données à Oxford en 1998.
Les contributions de Michael Sandel ont touché des millions de personnes non seulement à travers les nombreuses traductions de ses ouvrages (27 langues) mais aussi avec son cours « Justice » qui est disponible gratuitement sur internet et a été retransmis à la télévision. Toujours soucieux de rendre accessible et efficace la philosophie politique, il s’adresse aussi bien au grand public, notamment avec la série radiophonique de la BBC « The Public Philosopher », qu’aux décideurs politiques ; il siège entre 2002 et 2005 au conseil du President’s Council on Bioethics.
Charles Taylor
Biographie
Charles Taylor est professeur émérite de science politique et de philosophie à l’Université McGill où il a enseigné sans interruption de 1982 jusqu’à sa retraite, après avoir été professeur à Oxford de 1976 à 1982. Sa carrière, qui commence au département de science politique de McGill en 1961, allie l’engagement intellectuel et politique. À cette époque, alors qu’il est vice-président du NPD au fédéral et président de cette formation au Québec, il fera campagne contre le Parti Libéral et échouera en 1965 dans l’élection qui l’oppose au futur Premier Ministre du Canada, Pierre-Eliott Trudeau.
Cet engagement politique de haut niveau ne freine pas la production philosophique de Charles Taylor qui se concrétise par la parution de Explanation of Behaviour en 1964. Il développe sa réflexion sur les méthodes en sciences sociales et s’intéresse en particulier au problème de ce qui fait qu’un individu est un agent moral. Il publie en 1975 une somme sur le philosophe de Iéna, Hegel, suivi en 1979 de Hegel and Modern Society, deux ouvrages qui amorcent sa réflexion sur une politique de la reconnaissance.
Mais c’est avec la publication de Sources of the Self : The Making of the Modern Identity (Les sources du Moi. La formation de l’identité moderne) en 1989, que Charles Taylor s’impose comme un penseur qui fait l’histoire de la philosophie plus qu’il ne l’étudie. Cette œuvre dont on ne cesse de mesurer l’importance réfléchit le vaste regard que son auteur porte sur l’histoire de l’homme moderne, sa culture et son identité. Il s’agit de retrouver la question de la définition de la vie bonne que la philosophie morale et politique avait cherché à occulter.
L’originalité de la contribution à la théorie du multiculturalisme de Charles Taylor ne peut s’apprécier qu’à partir de cette réflexion sur l’identité qui rend possible le dialogue interculturel et l’élaboration d’un horizon de sens commun. Le philosophe montréalais approfondit les implications politiques de cette conception pluraliste de la vie démocratique dans Multiculturalism and The Politics of Recognition en 1992, et défend la pratique politique et juridique des accommodements raisonnables qui connaîtra une crise majeure au Québec dans la première décennie du XXIe siècle. Toujours impliqué dans la vie politique de la Belle Province à laquelle il reste attaché, il co-préside la Commission de consultation sur les pratiques d’accommodement reliées aux différences culturelles, dite commission Bouchard-Taylor, qui définit les contours de la politique québécoise de tolérance multiculturelle.
L’ampleur de sa contribution aux humanités est saluée par de nombreuses distinctions et prix. Il est nommé Grand officier de L’Ordre national du Québec en 2000, et reçoit entre autres le Prix Templeton (Etats-Unis, 2007) pour sa contribution au progrès de la recherche sur les spiritualités, le prix de Kyoto (Japon, 2008) et récemment le très prestigieux prix Kluge de la Library of Congress (Etats-Unis, 2015), prix qu’il partage avec le philosophe allemand, Jürgen Habermas.